« Le bail d’habitation type laisse très peu de marge de manœuvre »
Entretien avec Édouard Grimond, notaire.
Instauré par la loi Alur de 2014, le bail type présente certains avantages, à condition d’être établi sous la forme notariée. Une véritable sécurité pour propriétaire et locataire.
L’instauration d’un contrat de bail type* par la loi Alur de 2014 est-elle une bonne chose ?
Édouard Grimond : Oui, cela permet d’avoir des baux d’habitation standards, conformes aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur. En l’utilisant, bailleurs et locataires sont assurés que les règles de la loi du 6 juillet 1989 sont respectées et que chacun est protégé. On pourrait craindre, sinon, que des bailleurs non informés ou peu scrupuleux abusent de la situation pour introduire tout type de clause ou établissent par méconnaissance des baux juridiquement contestables voire nuls. En contrepartie, ce contrat laisse très peu de marge de manœuvre aux propriétaires.
Est-il permis d’ajouter des clauses facultatives ?
E. D. : Oui, le modèle de bail en mentionne d’ailleurs plusieurs. Elles sont rédigées avec le préambule « Le cas échéant». Elles ont toujours existé, mais les bailleurs les oubliaient parfois. Il s’agit, par exemple, de la possibilité de prévoir un dépôt de garantie à l’entrée dans les lieux, une clause de révision du loyer, une clause de solidarité des locataires, ou encore une clause résolutoire. Cette dernière permet la résiliation de plein droit du contrat de location pour un défaut de paiement du loyer ou des charges, le non-versement du dépôt de garantie, la non-souscription d’une assurance des risques locatifs ou le nonrespect de l’obligation d’user paisiblement des locaux loués, résultant de troubles de voisinage constatés par une décision de justice. Dans la mesure où le contrat de bail est très protecteur pour le locataire, il est important, à mon sens, de prévoir ces clauses favorables aux bailleurs : elles permettent de rééquilibrer les obligations de chacun.
Dans la mesure où le contrat de bail est très protecteur pour le locataire, il est important de prévoir ces clauses favorables au bailleur pour rééquilibrer les obligations de chacun.
D’autres clauses particulières peuvent-elles être ajoutées ?
E. D. : Oui, les parties sont libres d’en prévoir d’autres, dans la mesure où celles-ci sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur. Pour limiter les conflits lors de la restitution du dépôt de garantie, elles peuvent par exemple convenir de l’application d’une grille de vétusté. Il n’existe aucune grille standard. Les parties peuvent utiliser une grille utilisée par un organisme HLM et l’annexer au bail ou l’établir elles-mêmes en prévoyant, pour les principaux matériaux et équipements du bien, une durée de vie théorique et des coefficients d’abattement forfaitaire annuels affectant le prix des réparations locatives auxquelles serait tenu le locataire.
Autres précautions : prohiber la présence de chiens d’attaque, obliger le locataire à laisser intervenir un artisan en cas de travaux, ou encore prévoir d’ores et déjà qu’en cas de vente ou de relocation future du logement le locataire doit permettre les visites deux heures par jour ouvrable. Gare, en revanche, aux clauses interdites listées à l’article 4 de la loi de 1989 !
Le bail notarié est-il une bonne alternative au modèle de bail ?
E. D. : Même s’il est rédigé par le notaire, le bail respectera ce contrat type. Toutefois, le bail authentique présente, pour un coût modéré à partager entre les parties, un avantage certain, car il est revêtu de la formule « exécutoire ». Cela permet au propriétaire, en cas d’impayés, d’obtenir l’exécution forcée du paiement du loyer. Il peut ainsi contacter un huissier de justice et procéder par son intermédiaire à des mesures de saisie auprès du locataire mais aussi de la caution (sur les salaires, les comptes en banque, etc.) sans devoir aller en justice.
Propos recueillis par Rosine Maiolo
*Modèle de bail sur service-public.fr